• <figure class=" ob-pull-left ob-media-left ob-img-size-100 " > Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage </figure>

    Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage,
    Ou comme cestuy-là qui conquit la toison,
    Et puis est retourné, plein d'usage et raison,
    Vivre entre ses parents le res
    te de son âge !

    Quand reverrai-je, hélas ! de mon petit village
    Fumer la cheminée, et en quelle saison
    Reverrai-je le clos de ma pauvre maison,
    Qui m'est une province et beauc
    oup davantage ?

    Plus me plaît le séjour qu'ont bâti mes aïeux,
    Que des palais Romains le front audacieux :
    Plus que le marbre dur me plaît l'ard
    oise fine,

    Plus mon Loire Gaulois que le Tibre Latin,
    Plus mon petit Liré que le mont Palatin,
    Et plus que l'air marin la douceur
    Angevine.

          Joachim du Bellay


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  • EscargotUn escargot se croyant beau,
    Se croyant gros, se moquait d'une coccinelle.
    Elle était mince, elle était frêle !
    Vraiment, avait-on jamais vu
    un insecte aussi menu !
    Vint à passer une hirondelle
    Qui s'esbaudit du limaçon.
    Quel brimborion,
    s'écria-t-elle !
    C'est le plus maigre du canton !
    Vint à passer un caneton.
    Cette hirondelle est minuscule,
    Voyez sa taille ridicule !
    Dit-il sur un ton méprisant.
    Or, un faisan
    aperçut le canard et secoua la tête :
    Quelle est cette si minime bête
    Au corps si drôlement bâti !
    Un aigle qui planait leur jeta ces paroles :
    Êtes-vous fous ? Êtes-vous folles ?
    Qui se moque du précédent
    sera moqué par le suivant.
    Celui qui d'un autre se moque
    A propos de son bec, à propos de sa coque,
    De sa taille ou de son caquet,
    Risque à son tour d'être moqué !

     

                                            Pierre GAMARRA


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  • ·        aragon-elsa

    Tu Tu m'as quitté par toutes les portes
    Tu m'as laissé dans tous les déserts
    Je t'ai cherchée à l'aube et je t'ai perdue à midi
    Tu n'étais nulle part où j'arrive
    Qui saurait dire le Sahara d'une chambre sans toi
    La foule d'un dimanche où rien ne te ressemble
    Un jour plus vide que vers la mer la jetée
    Le silence où j'appelle et tu ne réponds pas
    Tu m'as quitté présente immobile
    Tu m'as quitté partout tu m'as quitté des yeux
    Du coeur des songes
    Tu m'as quitté comme une phrase inachevée
    Un objet par hasard une chose une chaise
    Une villégiature à la fin de l'été
    Une carte postale dans un tiroir
    Je suis tombé de toi toute la vie au moindre geste
    Tu ne m'as jamais vu pleurer pour ta tête détournée
    Ton regard au diable de moi
    Un soupir dont j'étais absent
    As-tu jamais eu pitié de ton ombre à tes pieds ?

    Louis Aragon "Les rendez-vous" recueil "Les Adieux"

          Joëlle M. nous apporte cet hommage à Louis Aragon pour le trentième anniversaire de sa mort.


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  • 48a8275cÀ la première Pâque il fleurie des lilas
    La terre est toute verte oublieuse d'hiver
    Tout le ciel est dans l'herbe et se voit à l'envers
    À la première Pâque

     

    À  la Pâque d'été j'ai perdu mon latin
    Il fait si bon dormir dans l'abri d'or des meules
    Quand le jour brûle bien la paille des éteules

    À la Pâque d'été

     

    À la Pâque d'hiver il soufflait un grand vent
    Ouvrez ouvrez la porte à ces enfants de glace
    Mais les feux sont éteints où vous prendriez place
    À la Pâque d'hiver.

     

    Trois Pâques ont passé revient le Nouvel An
    C'est à chacun son tour cueillir les perce-neige
    L'orgue tourne aux chevaux la chanson du manège
    Trois Pâques ont passé

     

    Revient le Nouvel An qui porte un tablier
    Comme un grand champ semé de neuves violettes
    Et la feuille verdit sur la forêt squelette
    Revient le Nouvel An.

     

    Saisons de mon pays variables saisons
    Qu'est-ce que cela fait si ce n'est plus moi-même
    Qui sur les murs écris le nom de ce que j'aime

     

     ARAGON

     


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  • ·       2853264668 1Je te nomme maître de l'éphémère
    Toi le gardien du nom
    Toi l'emblème des insolences
    Toi le mastondonte farceur qui joue
    à la bête mythologique
    et prend plaisir à étirer le temps
    Quand on te fête comme une idole

    Bartabas t'a sevré et pris pour Confident
    Il a écouté les histoires qui te hantent le sang
    La plainte que tu siffles en dormant
    Cette violence faite à l'infini
    Sitôt qu'il y a des enclos des frontières
    Ce long chuintement des chariots
    Pour les migrations qui se changent en exode. (...)

    Toi tu galopes en assommant les pierres
    Tu sais que ta force impressionne
    avec ses reflets d'argent
    Mais tu as l'oeil câlin sous le toupet
    Presque confiance dans les matins du monde
    Au fond tu n'es pas si vieux
    et tu as dix-sept ans.

    André Velter

    VoiMessage de Joëlle M. : une poésie, dans la série des animaux, sur le cheval emblématique qu'avait Bartabas "ZINGARO", nom donné à son théâtre équestre.


    Cet étalon frison belge a été acquis en 1984 par Bartabas à l'age d'un an. Quand il l'a acheté, Bartabas n'avait pas encore crée son cirque. Il sillonait alors l'Espagne en roulotte avec quelques copains. Zingaro a été le premier cheval du théatre équestre et il a donné son nom à la compagnie installée à Aubervilliers. Zingaro veut dire "Tsigane" en EspagnolZingaro n'a jamais connu d'autre cavalier que Bartabas. Entre l'homme et le cheval s'est crée une relation quasi passionnelle. Les deux personnages semblaient communiquer dans une totale complicité. Bartabas écoutait le cheval; Zingaro devinait les pensées de l'homme. Violent et tendre à la fois, imposant et doux, Zingaro était un grand acteur. Il avait véritablement de la présence sur scène, il était meme capable d'improviser. Zingaro a participé à plus de 1500 représentations ! Dressé à la haute école, c'est en liberté qu'il a donné le meilleur de lui meme. Dans "Cabaret équestre", il tirait un corbillard à pas lents et majestueux. Puis, babines retroussées et oreilles en arrières, il poursuivait son maitre qui campait un dresseur hystérique. Bartabas s'esquivait et le cheval se précipitait sur le premier rang des spectateurs qui se metaient à hurler. Au dernier moment, il pilait. Dans "Chimères", le cheval s'asseyait dans l'eau...

    Zingaro est mort le 30 novembre 1998 dans une clinique du New Jersey, après un mois d'hospitalisation pour une paralysie intestinale. Il avait dix-sept ans.




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  • alphsylH

     

     

     

     

    e! Dieu, si j'eusse étudié
    Au temps de ma jeunesse folle,
    Et à bonnes mœurs dédié,
    J'eusse maison et couche molle,
    Mais quoi! je fuyais l'école
    Comme fait le mauvais enfant.
    En écrivant cette parole
    A peu que le cœur ne me fend.

             

            François Villon




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  • 07La maman du petit homme
    Lui, dit un matin :
    "À seize ans, t'es haut tout comme
    "Notre huche à pain...
    "À la ville tu peux faire
    "Un bon apprenti ;
    "Mais, pour labourer la terre.
    "T'es ben trop petit, mon ami !
    "Dame, oui !"

    Vit un maître d'équipage
    Qui lui rit au nez
    En lui disant : "Point m'engage
    "Les tout nouveaux-nés !
    "Tu n'as pas laide frimousse.
    "Mais t'es mal bâti...
    "Pour faire un tout petit mousse,
    T'es ‘cor trop petit, mon ami,
    T'es ‘cor trop petit.
    "Dame, Oui !"

    Dans son palais de Versailles
    Fut trouver le Roi :
    "Je suis gâs de Cornouailles,
    "Sire, équipez-moi !"
    Mais le bon Roi Louis Seize
    En riant lui dit :
    "Pour être "garde française"
    "T'es ben trop petit, mon ami,
    "T'es ben trop petit
    "Dame, oui !"

    La Guerre éclate en Bretagne
    Au Printemps suivant,
    Et Grégoire entre en campagne
    Avec Jean Chouan...
    Les balles passaient, nombreuses
    Au-dessus de lui,
    En sifflotant, dédaigneuses :
    "Il est trop petit, ce joli,
    "Il est trop petit,
    "Dame, oui !"

    Cependant une le frappe
    Entre les deux yeux...
    Par la trou l'âme s'échappe :
    Grégoire est au Cieux !
    Là, Saint Pierre qu'il dérange
    Lui dit : "Hors d'ici !
    "Il nous faut un grand Archange :
    "T'es ben trop petit, mon ami,
    "T'es ben trop petit,
    "Dame, oui !"

    Mais, en apprenant la chose,
    Jésus se fâcha ;
    Entr'ouvrit son manteau rose
    Pour qu'il s'y cachât ;
    Fit entrer ainsi Grégoire
    Dans son Paradis,
    En disant : "Mon Ciel, de gloire,
    "En vérité, je vous le dis,
    "Est pour les Petits,
    "Dame, oui !"

     

                                 T. Botrel

     

    Ma soeur Mimi   rappelle ce beau texte . Merci pour cette particpation


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  • hirondelle de fenetre 002 (dessin)

     

    Voilà les feuilles sans sève
    Qui tombent sur le gazon,
    Voilà le vent qui s’élève
    Et gémit dans le vallon,
    Voilà l’errante hirondelle
    Qui rase du bout de l’aile
    L’eau dormante des marais,
    Voilà l’enfant des chaumières
    Qui glane sur les bruyères
    Le bois tombé des forêts.
     
    L’onde n’a plus le murmure
    Dont elle enchantait les bois
     ;
    Sous des rameaux sans verdure
    Les oiseaux n’ont plus de voix
     ;
    Le soir est près de l’aurore,
    L’astre à peine vient d’éclore
    Qu’il va terminer son tour,
    Il jette par intervalle
    Une heure de clarté pâle
    Qu’on appelle encore un jour.



            Lamartine


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  • 15 redi

    Mélancolique mer que je ne connais pas,
    Tu vas m'envelopper dans ta brume légère
    Sur ton sable mouillé je marquerai mes pas,
    Et j'oublierai soudain et la ville et la terre.

    Ô mer, ô tristes flots, saurez-vous, dans vos bruits
    Qui viendront expirer sur les sables sauvages,
    Bercer jusqu'à la mort mon cœur, et ses ennuis
    Qui ne se plaisent plus qu'aux beautés des naufrages ?

                                       Jean Moréas

     


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  • Poëme proposé par Joëlle et dans l'air du temps.  A l'origine chanté par Barbara,  mais je l'aime beaucoup par Catherine Ribeiro.

     


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  • 19

    Déjà les beaux jours, - la poussière,
    Un ciel d’azur et de lumière,
    Les murs enflammés, les longs soirs ; -
    Et rien de vert : - à peine encore
    Un reflet rougeâtre décore
    Les grands arbres aux rameaux noirs !

    Ce beau temps me pèse et m’ennuie.
    - Ce n’est qu’après des jours de pluie
    Que doit surgir, en un tableau,
    Le printemps verdissant et rose,
    Comme une nymphe fraîche éclose
    Qui, souriante, sort de l’eau.

     

                                    Gérard de Nerval, Odelettes

     


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  • chaumes-de-cordeville-a-auvers-sur-oise-1890-van-gogh-detaiMa chaumière aurait, l'été, la feuillée des bois pour
    parasol, et l'automne, pour jardin, au bord de la fenêtre,
    quelque mousse qui enchâsse les perles de la pluie, et
    quelque giroflée qui fleure l'amande.

    Mais l'hiver, - quel plaisir, quand le matin aurait secoué
    ses bouquets de givre sur mes vitres gelées, d'apercevoir
    bien loin, à la lisière de la forêt, un voyageur qui va
    toujours s'amoindrissant, lui et sa monture, dans la neige
    et la brume !

    Quel plaisir, le soir, de feuilleter, sous le manteau de
    la cheminée flambante et parfumée d'une bourrée de geniè-
    vre, les preux et les moines des chroniques, si merveil-
    leusement portraits qu'ils semblent, les uns jouter, les
    autres prier encore !

    Et quel plaisir, la nuit, à l'heure douteuse et pâle, qui
    précède le point du jour, d'entendre mon coq s'égosiller
    dans le gelinier et le coq d'une ferme lui répondre faible-
    ment, sentinelle juchée aux avant-postes du village endormi.,

    Ah ! si le roi nous lisait dans son Louvre, - ô ma muse
    inabritée contre les orages de la vie ! - le seigneur
    suzerain de tant de fiefs qu'il ignore le nombre de ses
    châteaux ne nous marchanderait pas une chaumine !

                       Aloysius  BERTRAND ( 1807-1841)

     


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  • coloriage-lettre-v

     

     

    enez à moi, claquepatins,
    Loqueteux, joueurs de musettes,
    Clampins, loupeurs, voyous, catins,
    Et marmousets, et marmousettes,
    Tas de traîne-cul-les-housettes,
    Race d'indépendants fougueux !
    Je suis du pays dont vous êtes :
    Le poète est le Roi des Gueux.

    Vous que la bise des matins,
    Que la pluie aux âpres sagettes,
    Que les gendarmes, les mâtins,
    Les coups, les fièvres, les disettes
    Prennent toujours pour amusettes,
    Vous dont l'habit mince et fongueux
    Paraît fait de vieilles gazettes,
    Le poète est le Roi des Gueux.

    Vous que le chaud soleil a teints,
    Hurlubiers dont les peau bisettes
    Ressemblent à l'or des gratins,
    Gouges au front plein de frisettes,
    Momignards nus sans chemisettes,
    Vieux à l'oeil cave, au nez rugueux,
    Au menton en casse-noisettes,
    Le poète est le Roi des Gueux.

    Ô Gueux, mes sujets, mes sujettes,
    Je serai votre maître queux.
    Tu vivras, monde qui végètes !
    Le poète est le Roi des Gueux.

     

               Jean Richepin


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  • resedaCelui qui croyait au ciel
    Celui qui n'y croyait pas
    Tous deux adoraient la belle
    Prisonnière des soldats
    Lequel montait à l'échelle
    Et lequel guettait en bas
    Celui qui croyait au ciel
    Celui qui n'y croyait pas
    Qu'importe comment s'appelle
    Cette clarté sur leur pas
    Que l'un fut de la chapelle
    Et l'autre s'y dérobât
    Celui qui croyait au ciel
    Celui qui n'y croyait pas
    Tous les deux étaient fidèles
    Des lèvres du coeur des bras
    Et tous les deux disaient qu'elle
    Vive et qui vivra verra
    Celui qui croyait au ciel
    Celui qui n'y croyait pas
    Quand les blés sont sous la grêle
    Fou qui fait le délicat
    Fou qui songe à ses querelles
    Au coeur du commun combat
    Celui qui croyait au ciel
    Celui qui n'y croyait pas
    Du haut de la citadelle
    La sentinelle tira
    Par deux fois et l'un chancelle
    L'autre tombe qui mourra
    Celui qui croyait au ciel
    Celui qui n'y croyait pas
    Ils sont en prison Lequel
    A le plus triste grabat
    Lequel plus que l'autre gèle
    Lequel préfère les rats
    Celui qui croyait au ciel
    Celui qui n'y croyait pas
    Un rebelle est un rebelle
    Deux sanglots font un seul glas
    Et quand vient l'aube cruelle
    Passent de vie à trépas
    Celui qui croyait au ciel
    Celui qui n'y croyait pas
    Répétant le nom de celle
    Qu'aucun des deux ne trompa
    Et leur sang rouge ruisselle
    Même couleur même éclat
    Celui qui croyait au ciel
    Celui qui n'y croyait pas
    Il coule il coule il se mêle
    À la terre qu'il aima
    Pour qu'à la saison nouvelle
    Mûrisse un raisin muscat
    Celui qui croyait au ciel
    Celui qui n'y croyait pas
    L'un court et l'autre a des ailes
    De Bretagne ou du Jura
    Et framboise ou mirabelle
    Le grillon rechantera
    Dites flûte ou violoncelle
    Le double amour qui brûla
    L'alouette et l'hirondelle
    La rose et le réséda

                       Louis Aragon

    Poëme  proposé par Joëlle  M..

    Merci Joëlle pour ce magnifique poëme que je ne connaissais pas

    ( Commentaire de Joëlle " Ce poème de Louis ARAGON fait partie du répertoire que chante
    Juliette GRECO. Elle passait sur ARTE ce soir, et elle l'a chanté. Un programme magnifique ce soir !!! Que du bonheur !
    Quelle femme merveilleuse !Cette émission repasse sur ARTE le 07.02 à 1 H et le 08.02 à 15 H05 pour celles et ceux qui aiment et qui l'auraient ratée. "


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  • aeaeLes  sept jours frappent à la porte.

    Chacun d'eux vous dit : lève-toi.
    Soufflant le chaud, soufflant le froid,

    Soufflant des temps de toute sorte

    Quatre saisons et leur escorte

    Se partagent les douze mois.

    Au bout de l'an, le vieux portier

    Ouvre toute grande la porte

    Et d'une voix beaucoup plus forte

    Crie à tout vent : premier janvier.

     

         Pierre Menanteau


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  • LIV4988ô rage ! ô désespoir ! ô vieillesse ennemie !
    N'ai-je donc tant vécu que pour cette infamie ?
    Et ne suis-je blanchi dans les travaux guerriers
    Que pour voir en un jour flétrir tant de lauriers ?
    Mon bras qu'avec respect toute l'Espagne admire,
    Mon bras, qui tant de fois a sauvé cet empire,
    Tant de fois affermi le trône de son roi,
    Trahit donc ma querelle, et ne fait rien pour moi ?
    ô cruel souvenir de ma gloire passée !
    Oeuvre de tant de jours en un jour effacée !
    Nouvelle dignité fatale à mon bonheur !
    Précipice élevé d'où tombe mon honneur !
    Faut-il de votre éclat voir triompher le comte,
    Et mourir sans vengeance, ou vivre dans la honte ?
    Comte, sois de mon prince à présent gouverneur ;
    Ce haut rang n'admet point un homme sans honneur ;
    Et ton jaloux orgueil par cet affront insigne
    Malgré le choix du roi, m'en a su rendre indigne.
    Et toi, de mes exploits glorieux instrument,
    Mais d'un corps tout de glace inutile ornement,
    Fer jadis tant à craindre, et qui, dans cette offense,
    M'as servi de parade, et non pas de défense,
    Va, quitte désormais le dernier des humains,
    Passe, pour me venger en de meilleures mains.

                Corneille ( Le Cid )


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  • 055 redimensionnerC'est un petit chat noir effronté comme un page,
    Je le laisse jouer sur ma table souvent.
    Quelquefois il s'assied sans faire de tapage,
    On dirait un joli presse-papier vivant.

    Rien en lui, pas un poil de son velours ne bouge ;
    Longtemps, il reste là, noir sur un feuillet blanc,
    A ces minets tirant leur langue de drap rouge,
    Qu'on fait pour essuyer les plumes, ressemblant.

    Quand il s'amuse, il est extrêmement comique,
    Pataud et gracieux, tel un ourson drôlet.
    Souvent je m'accroupis pour suivre sa mimique
    Quand on met devant lui la soucoupe de lait.

    Tout d'abord de son nez délicat il le flaire,
    La frôle, puis, à coups de langue très petits,
    Il le happe ; et dès lors il est à son affaire
    Et l’on entend, pendant qu'il boit, un clapotis.

    Il boit, bougeant la queue et sans faire une pause,
    Et ne relève enfin son joli museau plat
    Que lorsqu'il a passé sa langue rêche et rose
    Partout, bien proprement débarbouillé le plat.

    Alors il se pourlèche un moment les moustaches,
    Avec l'air étonné d'avoir déjà fini.
    Et comme il s'aperçoit qu'il s'est fait quelques taches,
    Il se lisse à nouveau, lustre son poil terni.

    Ses yeux jaunes et bleus sont comme deux agates ;
    Il les ferme à demi, parfois, en reniflant,
    Se renverse, ayant pris son museau dans ses pattes,
    Avec des airs de tigre étendu sur le flanc.

                              Edmond ROSTAND

                            


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  • 313-LETTRE-Q

     

     

    uand on arrêtera la course coutumière
    Du grand courrier des cieux qui porte la lumière,
    Quand on arrêtera l'an qui roule toujours
    Sur un char attelé de mois, d'heures, de jours,
    Quand on arrêtera l'armée vagabonde
    Qui va courant la nuit par le vide des cieux,
    Décochant contre nous les longs traits de ses yeux,
    Lors on arrêtera l'inconstance du Monde.

                                  Antoine de CHANDIEU

     

     


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  • 053Il est de clairs matins, de roses se coiffant,
    Où l'âme a des gaîtés d'eaux vives dans les roches,
    Où le coeur est un ciel de Pâques plein de cloches,
    Où la chair est sans tache et l'esprit sans reproches.
    Il est de clairs matins, de roses se coiffant,
    Ces matins-là, je vais joyeux comme un enfant.

    Il est de mornes jours, où las de se connaître,
    Le coeur, vieux de mille ans, s'assied sur son butin,
    Où le plus cher passé semble un décor déteint,
    Où s'agite un minable et vague cabotin.
    Il est de mornes jours las du poids de connaître
    Et, ces jours-là, je vais courbé comme un ancêtre.

     

                                          (A. Samain)


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    Ainsi, toujours poussés vers de nouveaux rivages,

    Dans la nuit éternelle emportés sans retour,
    Ne pourrons-nous jamais sur l'océan des âges
    Jeter l'ancre un seul jour ?

    Ô lac ! l'année à peine a fini sa carrière,
    Et près des flots chéris qu'elle devait revoir,
    Regarde ! je viens seul m'asseoir sur cette pierre
    Où tu la vis s'asseoir !

    Tu mugissais ainsi sous ces roches profondes,
    Ainsi tu te brisais sur leurs flancs déchirés,
    Ainsi le vent jetait l'écume de tes ondes
    Sur ses pieds adorés.

    Un soir, t'en souvient-il ? nous voguions en silence ;
    On n'entendait au loin, sur l'onde et sous les cieux,
    Que le bruit des rameurs qui frappaient en cadence
    Tes flots harmonieux.

    Tout à coup des accents inconnus à la terre
    Du rivage charmé frappèrent les échos ;
    Le flot fut attentif, et la voix qui m'est chère
    Laissa tomber ces mots :

    " Ô temps ! suspends ton vol, et vous, heures propices !
    Suspendez votre cours :
    Laissez-nous savourer les rapides délices
    Des plus beaux de nos jours !

    " Assez de malheureux ici-bas vous implorent,
    Coulez, coulez pour eux ;
    Prenez avec leurs jours les soins qui les dévorent ;
    Oubliez les heureux.

    " Mais je demande en vain quelques moments encore,
    Le temps m'échappe et fuit ;
    Je dis à cette nuit : Sois plus lente ; et l'aurore
    Va dissiper la nuit.

    " Aimons donc, aimons donc ! de l'heure fugitive,
    Hâtons-nous, jouissons !
    L'homme n'a point de port, le temps n'a point de rive ;
    Il coule, et nous passons ! "

    Temps jaloux, se peut-il que ces moments d'ivresse,
    Où l'amour à longs flots nous verse le bonheur,
    S'envolent loin de nous de la même vitesse
    Que les jours de malheur ?

    Eh quoi ! n'en pourrons-nous fixer au moins la trace ?
    Quoi ! passés pour jamais ! quoi ! tout entiers perdus !
    Ce temps qui les donna, ce temps qui les efface,
    Ne nous les rendra plus !

    Éternité, néant, passé, sombres abîmes,
    Que faites-vous des jours que vous engloutissez ?
    Parlez : nous rendrez-vous ces extases sublimes
    Que vous nous ravissez ?

    Ô lac ! rochers muets ! grottes ! forêt obscure !
    Vous, que le temps épargne ou qu'il peut rajeunir,
    Gardez de cette nuit, gardez, belle nature,
    Au moins le souvenir !

    Qu'il soit dans ton repos, qu'il soit dans tes orages,
    Beau lac, et dans l'aspect de tes riants coteaux,
    Et dans ces noirs sapins, et dans ces rocs sauvages
    Qui pendent sur tes eaux.

    Qu'il soit dans le zéphyr qui frémit et qui passe,
    Dans les bruits de tes bords par tes bords répétés,
    Dans l'astre au front d'argent qui blanchit ta surface
    De ses molles clartés.

    Que le vent qui gémit, le roseau qui soupire,
    Que les parfums légers de ton air embaumé,
    Que tout ce qu'on entend, l'on voit ou l'on respire,
    Tout dise : Ils ont aimé !

     

           Lamartine

     

     Michèle G. se souvenait de ce poëme, un peu long, mais si beau ...

     


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